L' Histoire commence n'est ce pas ? Que vais je raconter...



Cela faisait des années que je n'avais remis le pied à Frozen Hell, restant dans mon manoir, à m'occuper de mon territoire en faillite, sans voir personne, refusant de céder mes précieuses îles à Hongrie, refusant de commercer avec quiconque d'autre que Russie.




Et ce soir là, alors que le soleil déclinait lentement répandant ses rayons froids sur les murs de pierres grises, illuminant les dernières flaques d'eau que la pluie avait abandonnée, j'étais là, dans cette rue presque déserte, enroulé dans ma cape. J'avançais lentement, prenant soin de ne pas salir mes chaussures cirées qui claquetaient sur les pavés.

Mes pensées allaient vers tous les gens que j'avais rencontrés depuis mon retour ici, me guidant dans le quartier comme si j'étais un fantôme. Une vague de chaleur étrange me percuta, une chaleur telle que je n'en avais connue depuis des années. Une caresse sur ma peau blanche, un souffle presque, et une lueur qui se diffusait de la porte d'entrée d'un café bruyant. Aurais je dû passer mon chemin ? Éviter la foule, comme d'habitude, me cacher derrière la honte de mes agissements durant la Seconde Guerre ? Ma dictature... Mais qu'est ce que je raconte, je suis navré, cela n'est pas le sujet de mon histoire aujourd'hui. Pardonnez si je m'égare.

Je me retrouvais donc seul, devant cette porte chaleureuse. Et bien quoi ? Je passais mon chemin, c'est vrai. Mais je ne suis pas à blâmer ! Je continuais lâchement ma route, les lampadaires s'allumaient alors faiblement, dans le crépitement agressif de l'électricité, mais ce fut la nuit qui m'enveloppa. C'était comme une mère de brouillard, une mer de noir, ma mère. J'achetais pour quelques lei un sachet de « cornulete » encore tièdes, que je dégustais, nostalgique.




Il n'y avait plus personne dans les rues, lorsque je sortis enfin de mes pensées, je ne pouvais qu'entendre le bruit régulier de mes chaussures, et de ma respiration. Atmosphère pesante, j'activais le pas. Aucun mouvement autour de moi, tant et si bien, que je réussis idiotement à me faire peur moi même, lorsqu'à un angle de mur, ma cape se frotta contre la pierre, produisant un son comme un murmure.




Je me retrouvais alors étonnement, devant le même café où je m'étais arrêté plus tôt, comme un coup du destin, ou bien, pour les plus rationalistes d'entre nous, un tour de mon subconscient qui avait enregistré cet endroit comme étant quelque chose de bien et d'accueillant.

Je fixais la porte, hésitant, avant de m'engouffrer à l'intérieur, apportant avec moi le vent froid qui fit grincer certains occupants auxquels je n'accordais guère d'attention. Le café était décoré sommairement, mais plus chaleureusement que dans n'importe quel endroit de mon pays, le comptoir m'était particulièrement attirant, et je m'approchais sans hésiter pour y commander un verre de bon vin. La serveuse, aimable, me servit avec un sourire et je la payais non sans laisser un pourboire généreux, avant de me mettre à la recherche d'un table. J'en trouvais une, admirablement bien placée, au fond de la salle, dans l'angle, mais avec une vue stratégique sur toute la salle et les allées et venues par la porte. J'étais assez loin cependant pour ne pas ressentir sur moi l'air glacé qui entrait dans un tourbillon de vent à chaque ouverture de ladite porte.




Le vin diminua plus lentement que prévu, mais je commençais à avoir mal à la tête, ce bruit ambiant m'était inhabituel. La porte s'ouvrit, pour la je ne sais combien de fois encore, il y eu un courant d'air et une jeune femme entra. Une jeune femme que je ne connaissais pas, que je n'avais jamais vu et qui attisait ma curiosité.